« Ce tombeau sera votre tombeau ! »
Jour 6
De retour à Louksor, notre avant-dernière journée d’excursion a été intense. Nous avons mis le cap sur le temple de la reine Hatchepsout, une reine-pharaon. Il a été construit sur la rive ouest du Nil, sur le site de Deir el-Bahari. Contrairement aux temples funéraires traditionnels, celui d’Hatchepsout ne possède pas de pylônes ; ils ont été remplacés par des portiques à l’entrée de chacune des trois terrasses. La construction a débuté aux alentours de 1479 av. J.-C., durant les premières années du règne de la reine, et a duré environ quinze ans. Le temple est principalement dédié à Hathor, Amon-Rê et Anubis1. Hatchepsout est l’une des premières reine pharaon d’Égypte. Fille du pharaon Thoutmôsis Ier, Hatchepsout a co-régné avec son demi-frère Thoutmôsis II puis a été régente durant l’enfance de son beau-fils Thoutmôsis III. Toutefois, alors que celui-ci était en âge de régner, Hatchepsout a conservé le pouvoir et s’est fait couronner pharaon ; son règne s’est poursuivi durant 20 ans2. Dès lors, elle a abandonné les attributs féminins traditionnels pour adopter les symboles masculins du pouvoir (némès, barbe postiche et autres attributs royaux). Elle est d’ailleurs représentée en pharaon osiriaque3 à divers endroits du temple. Comme tout grand souverain avant elle, Hatchepsout a décidé d’ériger un temple à sa gloire. Celui-ci se dresse sur trois étages : le premier niveau raconte la vie de la reine (notamment le voyage entrepris par ses envoyés vers le pays de Pount, actuelle Somalie, d’où ils ont rapporté de l’encens, de l’ivoire, de l’or, de l’ébène, un lion et une girafe) ; le second explique comment Amon-Rê lui aurait donné la vie ; le troisième l’honore comme une déesse.
Après cette visite sous une chaleur déjà accablante à tout juste 9 heures, nous avons rencontré des tailleurs de pierre qui nous ont fait une démonstration de leur activité : ils fabriquent en albâtre, granit ou encore ardoise, statuettes, vases et pots.
Par la suite, nous avons rejoint la vallée des Rois. Située près de Louxor, elle abrite les tombeaux (ou hypogées) de nombreux pharaons du Nouvel Empire, de Thoutmôsis Ier à Ramsès XI. Actuellement, 60 tombes nous sont connues, mais toutes ne sont pas ouvertes au public. Avec le ticket d’entrée, nous pouvions visiter trois tombes de notre choix. À cause de la chaleur étouffante (plus de 45 degrés entre 10h30 et 11h), nous n’en avons visité que deux, celle de Ramsès III et celle de Tausert & Setnakht. Ces sépultures sont étonnement bien conservées, tout particulièrement les couleurs sur les bas-reliefs qui sont si vives que nous n’avons pas l’impression que ces tombeaux datent de plus de 3000 ans.
Avant de retourner sur le navire nous rafraichir, nous avons fait un arrêt photo devant les colosses de Memnon. Ce sont deux statues gigantesques représentant Aménophis III, non loin de Louxor. Le pharaon est représenté assis sur un trône, les mains sur les genoux, regardant le soleil levant. Dans la mythologie grecque, Memnon participa à la légendaire guerre de Troie où il fut tué par Achille. Une légende raconte qu’un tremblement de terre aurait renversé l’un des deux colosses et que depuis, l’autre aurait commencé à chanter tous les matins à l’aube ; puis, au début du IIIe siècle, l’empereur romain Septime Sévère aurait reconstruit la statue endommagée et son « jumeau » aurait été réduit au silence. Malheureusement, aujourd’hui les deux statues sont très abimées.
Après le déjeuner (une douche et un coup de clim), nous sommes ressorties. Nous nous sommes d’abord rendues dans une boutique de papyrus où un artisan nous a expliqué comment étaient fabriqués les papyrus4[4]. Puis, nous avons visité la mosquée Abou el-Haggag, construite sur une partie du temple de Louxor ; depuis la terrasse, nous pouvions voir à l’intérieur du temple de Louxor. Enfin, nous sommes allées au souk acheter quelques souvenirs. Nous ne sommes pas restées longtemps à cause de la chaleur mais également car nous étions gênées des incessants et insistants harponnages d’hommes ou d’enfants tentant de nous vendre des breloques et colifichets. Finalement, nous avons pris un verre dans un café du souk avec Wael, notre guide, avant de rentrer.







« J’avais aussi pensé à ‘’Bande de chacals, vous allez crever comme des chacals’’. Mais ça faisait deux fois ‘’chacals’’ donc… Quoi, on dit des ‘’chacaux’’ » ?
Jour 7
Pour notre dernier jour en Égypte, la moitié des Copines sont parties passer la journée au Caire afin de voir les pyramides de Gizeh, où elles ont fait une petite balade à dos de chameau, et visiter le nouveau musée du Caire où sont notamment exposées les collections du tombeau de Toutankhamon. Le reste du groupe est parti se promener à Louxor. Nous sommes d’abord entrées dans la magnifique cathédrale copte (c’était le 15 août, il y avait donc un office religieux), puis nous avons visité le musée de Louxor où étaient exposés des objets funéraires, des statues de pharaons, des pans de bas-reliefs et surtout deux momies. Enfin, meilleur moment de la matinée à mes yeux, nous nous sommes arrêtées devant le Winter Palace où a séjournée Agatha Christie lorsqu’elle a écrit une partie de son célèbre roman Mort sur le Nil en 19375. C’est l’hôtel le plus luxueux de Louxor, reconnaissable à son architecture victorienne. Il a été construit en 1886 et rénové en 1995. Outre la Reine du crime, d’autres personnalités publiques y ont résidé, parmi lesquelles sir Winston Churchill, Margaret Thatcher, Valery Giscard d’Estaing, le Prince Charles et Lady Diana ou encore Rudyard Kipling. C’est d’ailleurs dans le Winter Palace qu’Howard Carter a annoncé avoir découvert la tombe du célèbre Toutankhamon en 1922. Il est possible de visiter l’hôtel, toutefois le prix est assez élevé pour une visite de courte durée (entre 15 et 20€), nous avons donc décliné. Néanmoins, notre super guide Wael a négocié pour que l’on puisse prendre des photos dans le lobby de l’hôtel qui est très vintage et ne semble pas avoir beaucoup changé depuis sa grande époque d’avant-guerre.
Le reste de l’après-midi, nous nous sommes détendues sur le pont puis dans le salon-bar où nous avons joué avec acharnement au Uno.







« S’ils ressortent de ce tombeau, je promets de ne plus jamais me raser la tête. »
Jour 8
Jour de retour vers Paris. Notre départ vers l’aéroport étant prévu pour 11h30, nous avons profité une dernière fois de la vue sur le Nil depuis le pont du bateau. À l’aéroport, nous étions toutes d’humeur plutôt morose à l’idée de devoir quitter l’Égypte et se séparer, mais nous avons tout de même essayer de conserver notre bonne humeur et de profiter les unes des autres. Notre dernier repas en commun à l’aéroport a été plutôt expéditif, puisqu’à peine installées, on nous a pressées pour rejoindre la porte d’embarquement. Le vol de retour a été calme, l’occasion de se reposer après une semaine où le sommeil nous a fait défaut. Arrivées à Charles de Gaule, il était temps de se séparer ; l’œil humide, nous nous sommes promis de garder le contact et de nous revoir très vite. Promesse tenue puisque rendez-vous a été pris cet automne en Bretagne.
« – C’est une bonne situation ça scribe ?
– Vous savez, moi je ne crois pas qu’il y ait de bonne ou de mauvaise situation. Moi, si je devais résumer ma vie aujourd’hui avec vous, je dirais que c’est d’abord des rencontres. Des gens qui m’ont tendu la main, peut-être à un moment où je ne pouvais pas, où j’étais seul chez moi. Et c’est assez curieux de se dire que les hasards, les rencontres forgent une destinée… Parce que quand on a le goût de la chose, quand on a le goût de la chose bien faite, le beau geste, parfois on ne trouve pas l’interlocuteur en face je dirais, le miroir qui vous aide à avancer. Alors ça n’est pas mon cas, comme je disais là, puisque moi au contraire, j’ai pu : et je dis merci à la vie, je lui dis merci, je chante la vie, je danse la vie… je ne suis qu’amour ! Et finalement, quand beaucoup de gens aujourd’hui me disent ‘’Mais comment fais-tu pour avoir cette humanité ?’’, et bien je leur réponds très simplement, je leur dis que c’est ce goût de l’amour ce goût donc qui m’a poussé aujourd’hui à entreprendre une construction mécanique, mais demain qui sait ? Peut-être simplement à me mettre au service de la communauté, à faire le don, le don de soi… »
- Anubis est le dieu funéraire de l’Égypte antique, le maître des nécropoles et le protecteur des embaumeurs ; il est représenté avec une tête de chacal. ↩︎
- Afin de légitimer son règne, Hatchepsout a prétendu qu’Amon était apparu à sa mère sous les traits de Thoutmôsis Ier et serait donc son père, faisant d’elle une demi-déesse. ↩︎
- Relatif à Osiris. ↩︎
- On utilisait la tige pour fabriquer du papyrus. D’abord, on l’épluchait, puis on la découpait en fines lamelles. Après un temps de trempage (une semaine maximum, deux semaines si on voulait obtenir un papyrus foncé), on disposait les lamelles en les croisant, enfin on les mettait sous presse où elles séchaient. ↩︎
- Agatha Christie a découvert le Nil en 1933 lors d’un voyage avec son second époux, l’archéologue Max Mallowan. Elle a navigué sur le Nil à bord d’un navire Thomas Cook, le « SS Sudan », depuis Assouan. Elle a fait une escale à Louxor et a séjourné au Winter Palace. Sa croisière sur le Nil l’aurait fortement marquée et inspirée puisque quelques années plus tard, elle a écrit Mort sur le Nil, un roman dans lequel le célèbre détective belge Hercule Poirot résout le meurtre d’une riche héritière lors d’une croisière sur le Nil. ↩︎
